Le grand chef français Alain Ducasse, dans son Dictionnaire amoureux de la cuisine, énonce ses valeurs et sa philosophie concernant son métier. J’y trouve tellement de ressemblances avec ce qui se passe dans un marché public que j’ai le gout de partager avec vous ce voyage vers l’essentiel. Voici quelques-unes de ses étonnantes périphrases :
Alain Ducasse : S’il me fallait utiliser un seul adjectif pour décrire la cuisine que j’aime pratiquer, j’irais droit au but, sans commentaire descriptif : je la dis «essentielle». (…) Elle est essentielle parce qu’elle ne tient rien pour acquis et repart au début, là où nait le produit le plus frais, le produit cultivé ou élevé avec passion. (…)
L’essentiel est de trouver l’équation juste, l’harmonie sincère entre les différents éléments qui composent le plat, de manière à susciter une rencontre authentique, inédite entre les saveurs, les textures et les odeurs.
(…) Je veux que le gout du produit, celui que j’ai choisi pour une raison très précise, soit restitué dans sa totalité, dans son intégrité, autant dans sa préparation que dans sa présentation.
Ainsi, Ducasse tient le produit cultivé ou élevé par un producteur authentique, dans un lieu significatif, comme la base incontournable et fondamentale de sa cuisine. Plus encore, il ne veut pas le défigurer mais, mettre en valeur son vrai gout, sans artifice de camouflage pour faire beau. On comprend alors la chance que nous avons, dans notre marché, de recevoir tous ces vrais éleveurs, maraichers, volaillers, acériculteurs, apiculteurs qui, par passion, nous proposent ce qui se fait de mieux. En cuisine, le chef est là, lui, pour magnifier davantage encore les produits, en les jumelant adéquatement à d’autres. De sorte que par la magie du gout, les caractéristiques individuelles de chaque aliment se fondent en une famille harmonieuse de saveurs. Philosophiquement parlant, il parait évident que de cultiver son gout, c’est se cultiver soi-même, comme on cultive la terre : mon esprit et mon corps sont un champ en friche auquel je peux donner toute sa beauté et sa force en l’enrichissant par des nourritures plus complexes, plus audacieuses…
Je crois qu’il faut rendre hommage à nos producteurs qui fournissent, par leurs efforts, «l’essentiel» de ce qui permet à la cuisine de s’exprimer comme un art. En les encourageant chaque semaine, nous nous rapprochons de l’essence des choses, qui consiste finalement à nous nourrir et à nourrir nos familles avec ce qu’il y a de meilleur. Cela s’appelle l’engagement.
Diane Seguin

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